Saturday, July 28, 2012

LE MASSACRE DU MAC VAL

Je vais quand même vous dire pourquoi je vous envoie tout ça. Sinon on va croire que je critique. Or je ne critique pas. Non, je ne critique pas, j’ai peur.livign dead
J’ai peur que l’art français soit mort. Je ne dis pas ça avec légèreté. Cela fait bientôt huit ans que je suis revenue vivre à Paris. J’ai attendu avant de me prononcer. Alors voilà, je le dis: En France, l’art est mort. Et j’ai bien failli y passer. Je vous jure, j’ai manqué de peu de me faire bouffer par les zombies. C'est dans les phrases, entre les mots, dans les verbes et leur fonctionnement. Un virus pire que celui de Burroughs. Cependant, je ne sais pas si ce détournement du langage de l'art est un symptôme ou si c'est l'attaque elle-même. Une bactérie. Une lente corruption de la pensée. Je suis entourée de morts-vivants et on me parle comme à une déficiente mentale. Tout va bien. Il ne faut pas chercher les ennuis.
Un copain m’appelle. body snatchersIl est embêté. Il a invité un artiste anglais pour une performance dans son atelier et il se rend compte que le Mac Val fête ses cinq ans au même moment. J’avais vu passer l’information, mais leur offre «gagnez un pass duo pour un an» m’a fait passer à autre chose immédiatement. On nous parle déjà comme ça pour les téléphones, les machines à laver, les voyages et les crèmes hydratantes, alors en art, les pass duo, non merci. J’ai donc été voir sur le site du Mac Val, pour me faire une idée, pour savoir si nos amis allaient préférer l’anniversaire à la performance. C'est pas dit, comme on dit. Mais voilà, je lis, et de nouveau je suis confrontée à ces tournures étranges. Des rhizomes de pensées bizarres avec une faute de syntaxe, de grammaire ou d'orthographe par phrase. Vous allez peut-être trouver que j'exagère, que j'en fais trop. De toute façon, c'est toujours comme ça. Elle est folle. Mais tout le monde le sait que c'est du pipeau. Tu nous l'as déjà fait. Body Snatchers. C'est la deuxième fois que je fais une analyse de texte. C'est redindondant?
deliveranceJe vous avais dit que j'étais dans un film d'horreur.
C'est l'artiste John Russell qui m'a fait découvrir ce genre cinématographique. Quand mon homme est mort, j'ai eu l'impression que c'était les seuls films à pouvoir représenter un certain type d'expériences de la vie avec réalisme. The exorcist.

Bien sûr, "Let's Dance" fait référence au célèbre album de David Bowie (1983), aux accents mélancoliques.
Première phrase et je suis déjà perplexe. Je vais réécouter rapidement et je ne perçois pas d’accents mélancoliques. Bon, peut-être que l’auteur a voulu dire que l’album pouvait rendre un auditeur de plus de 27 ans mélancolique. Aux accents mélancoliques, ne s' appliquerait pas à l'album mais à celui qui l'écoute. Ah la grammaire! 
Comment le titre Let’s Dance fait-il référence au titre Let’s Dance puisque ce sont exactement les mêmes mots? Et puis, pourquoi ce Bien sûr? Parce que c’est celui de David Bowie et pas l'éponyme comédie musicale avec Fred Astaire, bande de ringards pas pop. Vous trouvez que j'abuse? Que ce n'est pas grave? C'est moi qui perds la tête. Peut-être. Rosemary's baby. Don't look back. Don't read.carrie
Une invitation? Une injonction?
Euh? Pourquoi me pose-t-on la question? Oui, let’s dance me semble être une invitation à la danse. Une injonction ou un ordre me semblerait un peu fort.
Help. À moins qu'on soit vraiment déjà dans un remake de Carrie.
Curieusement, ce titre séduisant raisonne comme un slogan autrefois scandé par Act Up : "J’irai danser quand même !"; car il s'agit bien ici d'une forme de résistance.
Bon, je ne trouve pas que ça raisonne (résonne peut-être?) avec le slogan d’Act Up, ou alors curieusement, très curieusement. Il y a le terme danse et peut-être une relation entre Bowie et Act up que j’ignore. En revanche j’imagine qu’on peut les mettre en parallèle. Mettre en parallèle, ça marche toujours assez bien. Quant à la résistance, à priori, ça m’intéresse. Enfin, plus que ça même. Surtout quand il s’agit bien ici de résistance. Invasion of the Body Snatchers. Body Snatchers.



Cette exposition collective nous livre une vision de l'envers du décor. Mélancolique, le propos de l'exposition l'est d'une certaine manière.
De nouveau perdue. De nouveau pas comprendre moi. Résistance donc mélancolie? Mouais… Envers du décor donc mélancolie? Quel décor?
body snatchersUn propos mélancolique? Si c’est comme l’album de Bowie, ça ne va faire trop pleurer que les très gros dépressifs, ou les mélancoliques. Ou alors, c'est traduit de l'Allemand et il y a un stagiaire qui va se faire taper sur les doigts. Dans l'espace personne ne t'entend crier. En enfer, personne n'écoute tes problèmes de syntaxe

suspiriaÉprouver le besoin irrépressible de commémorer ensemble les événements marquants de la vie est l'un des fils rouges de l'exposition qui relient la cinquantaine d'oeuvres d'artistes internationaux rassemblés pour "Let's Dance" du 22 octobre au 16 janvier 2011.
Le style un peu lourd rend la lecture malaisée, mais un besoin irrépressible, vraiment, ça m’échappe… Quant à l’éprouver comme fil rouge d’une exposition, je ne vois pas. Help. Deep Red.
Est-ce juste inélégant? Mal écrit? Grossier?
Suis-je stupide? Méchante? Malhonnête? Malintentionnée? Suspiria. Massacre à la tronçonneuse.
Le besoin irrépressible de l’anniversaire, franchement je ne comprends pas. Ce n'est quand même pas comme si je lisais une publication scientifique avec des concepts que je ne maîtrise pas. Ici, le sens est comme une bête qui se cache. On ne sait même pas si elle est féroce ou pas, dangereuse ou pas. Blessée? Alien.

"Let's Dance" propose de visiter les lieux communs de la célébration à travers ses motifs : l'anniversaire, le feu d'artifice, la bougie, le gâteau, la fête des voisins, les rituels de passage, la musique...deep red
C’est là que je ne peux plus lire -en tentant de passer outre la maladresse. Là, c’est trop. Le bénéfice du doute, je veux bien, mais quand même, je ne peux pas me rendre débile parce que c’est le Mac Val et qu’ils ont déjà près de 900 personnes sur leur page facebook events. Visiter les lieux communs comme la bougie? Je me sens fébrile. Comment parler sérieusement aux organisateurs? Bonjour, c’est très intéressant cette visite de lieux communs. Ah le rituel de passage, c’est dur. Très dur. Après la confusion orthographique entre raisonner et résonner, la confusion entre points communs et lieux communs, je ne sais même pas comment entendre le terme de motif dans ce contexte. Justification ou ornement? L’anniversaire serait une justification, la bougie un ornement, ou le contraire? Profondo Rosso. Attention, ça va en crescendo, on continue, les points de suspension dans le texte.

...qui sont autant de points de rencontre des communautés qui n'empêchent pas cependant, la solitude.
chainsaw massacre
Je vous jure, là j’ai l’impression d’être sur une autre planète. Je vérifie encore mon copier/coller. Oui, c'est bien la présentation d’une exposition d’un Musée d'Art Contemporain qui tourne avec 3,5 millions d’euros de budget annuel. Ce n’est pas cynique. Ce n’est pas une blague. C’est le réel. The return of the real -as the living dead. Massacre à la tronçonneuse. Pourquoi continuer à lire? Pourquoi se fatiguer à analyser? Si je lis, je suis quand même bien censée m'impliquer, non? Encore une fois, ça s'adresse à qui? Qui saisit? À qui parlez-vous? Je sais que tout le monde se moque royalement du site du Mac Val.Mais on va tous au vernissage quand même... Qu'est-ce que je fous là-dedans? Il faut faire comme si de rien n'était. Bisous. Bisous.
L'exposition a ainsi été conçue comme une grande Vanité...
Phrase simple, idée claire. Enfin presque. Ça sonnerait quand même mieux sans le ainsi : «L’exposition est conçue comme une grande Vanité.» Là je suis. Mais pas pour longtemps. Je ne vois de lien ni avec les anniversaires, ni les fêtes de voisins, ni l’album de Bowie, ni l’envers du décor. Ah! une pièce de Douglas Gordon avec un crâne. Bon... quand il y a un crâne, on peut mettre vanitas dans le texte. Ce n'est pas grâââve, ce n'est pas ça le poison, ça c'est un faux, un leurre. Ce n'est pas trop dangereux, c'est juste un peu facile.



Au fur et à mesure de l'exposition, des bribes de récits se tissent.
Parcours narratif j’imagine. Ok. Le commissaire raconte une histoire, que le dossier du site ne nous explicite pas mais que le spectateur, à travers sa déambulation dans le musée doit percevoir de façon fragmentée. Ce n'est pas vraiment évident dans le titre mais bon. Où suis-je? Maman? Maman t'es où? Ça ne devrait pas trop me toucher une phrase comme ça, mais si, ça me touche. Parce que mon cerveau est obligé de traduire des bribes de récits qui se tissent. Je dois interpréter. Pourquoi me parlez-vous comme ça? Qu'est-ce qui se passe ici? Saloperie d'infection. Je grimace. Je secoue la tête. Science-fiction. The Wicker Man.


Des événements perçus comme à la dérobée, au détour d'une installation ou d'une sculpture, d'une vidéo ou d'une peinture, sont autant de moments brefs, troublants et incomplets.

alienDes événements perçus comme des moments incomplets? Je vous assure, que d’habitude je cherche. J’aime bien réfléchir. J’adore ça même et je sais que tout n’est pas immédiat dans la pensée de l’art, mais là ça ne décolle pas. Je ne sais pas. Je n’y arrive pas. Un blocage neuronal. Quelque chose dans le cerveau, qui m’empêche de relier les mots entre eux, de suivre les constructions grammaticales. Peut-être une tumeur. C'est moi, ou c'est eux? Est-ce que j'ai perdu une capacité de perception du réel. Est-ce que tout le monde va bien rigoler? Elle ne comprend même pas ce que c'est des événements perçus comme à la dérobée? J'adore l'art. Ne me frappez pas. Qu'est-ce que c'est? Je ne suis que rien, personne, je m'excuse, je n'y peux rien. Qui êtes-vous? Que me voulez-vous? A toutes les phrases ça me provoque, ça m'accable, ça m'inquiète. C'est peut-être dans le texte la tumeur et pas dans ma tête. Je ne fais pas exprès. October.
Mais, ces scènes sont assez universelles pour permettre à tous et à chacun de s'y identifier.
À part pour la colle, moi, l’universel ça me fait peur, mais ce serait trop long à vous raconter et puis là on serait dans la discussion. 1984. Ici, c'est à tous et à chacun que je ne comprends pas. C'est là que je butte. Si on dit à tous pourquoi ajouter chacun? Chacun n’est pas dans tous? Pourquoi à chaque phrase en me refait le coup. Je commence vraiment à avoir des doutes. Est-ce bien un texte sur le site du Mac Val? Suis-je bien en train de citer? On dirait que ça a été piraté. Que quelqu'un a eu accès aux donnés et se moque d’eux. Opera. Opera. Alien. Suspiria. Help.
Toutefois, à la différence des clichés qui décrivent des situations parfaitement stéréotypées, "Let's Dance" se joue de l'ambiguïté des objets.
Vous comprenez pourquoi j’ai peur? Là, vous ne pouvez pas ne pas me comprendre, Vous ressentez, n’est-ce pas? Comme ça mine. Moi, ça me touche dans mon corps. Ça dérange mes muscles, mes os, mes cellules, ça atteint mes nerfs, ma respiration. Qu’est ce que c’est des situations parfaitement stéréotypées? Pourquoi on m’explique ce qu’est un cliché et pas un stéréotype ? Et une exposition qui se joue de l’ambiguïté d’objets? Je suis obligée d’aller chercher dans un dictionnaire- je vous jure, j’en perds ma langue. "Se jouer", c'est soit "Se recréer, se divertir", soit "dédaigner, regarder quelqu’un ou quelque chose comme négligeable, témoigner qu’on n’en fait point de cas". Là, vous ne pouvez pas dire que ce n'est pas bizarre quand même, une exposition qui se moque de l'ambiguïté des objets à la différence des clichés. Là, vous voyez, vous sentez? Don't Look Now.

Pour l'exposition "Let's Dance", rien d'ironique ou de morbide, pas plus que d'effusion ou d'empathie.
Ah ben voyons, il manquerait plus que de l'empathie. Pas de pathos, pas d'émotion mais des scènes universelles. Let’s dance en injonction, vous allez danser bandes de salauds, les Stepford Wifes sans effusion, identification aux stéréotypes, mais pas aux clichés. stefrods wifesSe jouer de lieux communs qui raisonnent. Help. Pas d'empathie. Surtout pas. Pas d'ironie. Pas d'ironie. Pas d'ironie. Help. C'est la fin du film, en tout cas de celui-là. Après je vous jure, je ne vous fait plus jamais d'analyse de texte. Je ne lirai plus.
Nulle récupération du passé, nulle anticipation de l'avenir. Quand l'intemporalité s'installe, même la nostaslige n'existe plus.
Apothéose. L’attaque finale des zombies, des aliens, enfin de tout. Je vous avais dit. Du pur evil. Un film d’horreur. Même la nostalgie n’existe plus. Ah ah ah ah ah ah ah... Vous voulez un pass duo gratuit d’un an? ah ah ah…

No comments:

Post a Comment